6/12/2020

Inégalités et économie informelle : comment passer de la réponse de crise à la résilience durable ?

Lors d’un panel de haut niveau organisé par le SDG Lab et l’Organisation Internationale du Travail (OIT), basé sur les inégalités et l’économie informelle au cours de la pandémie de COVID-19, les intervenants ont réitéré le rôle que pourraient jouer des gouvernements en fournissant une protection sociale aux travailleurs informels et autres groupes vulnérables, non seulement en tant que mesures de crises mais en tant que dispositions politiques pouvant construire une résilience long terme en appui à l’Agenda 2030.
Inégalités et économie informelle : comment passer de la réponse de crise à la résilience durable ?

Ressources tirées de l’évènement en Anglais:

Lors d’un panel de haut niveau organisé par le SDG Lab et l’Organisation Internationale du Travail (OIT), basé sur les inégalités et l’économie informelle au cours de la pandémie de COVID-19, les intervenants ont réitéré le rôle que pourraient jouer des gouvernements en fournissant une protection sociale aux travailleurs informels et autres groupes vulnérables, non seulement en tant que mesures de crises mais en tant que dispositions politiques pouvant construire une résilience long terme en appui à l’Agenda 2030.

Tenue le 9 Juin, la session virtuelle portant sur ‘Les Inégalités durant et après le COVID-19’ nous a offert l’opportunité d’apprendre sur les politiques, programmes et approches que trois pays, la Jordanie, le Portugal et l’Afrique du Sud ont mis en place pour aider les travailleurs du secteur informel et leurs communautés rurales touchés par la pandémie du coronavirus, qui, mondialement a affecté à peu près 1,6 milliards de travailleurs dans l’économie informelle,  soit presque la moitié de la force de travail mondiale.

Selon l’OIT, la pandémie a poussé les moyens de subsistance des travailleurs de l’informel au bord de l’effondrement, les revenus ayant été considérablement réduits. En conséquence, le taux de pauvreté a augmenté pour la première fois sur plus de deux décennies et les autres vulnérabilités socio-économiques ont été exposées au détriment du progrès mondial dans la réduction des inégalités et la réalisation des objectifs de développement durable (ODD).

Les participants de la web-conference étaient : La Directrice générale de l’ONU Genève Tatiana Valovaya; le Directeur général de l’OIT Guy Ryder; la Secrétaire Exécutive de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Amérique Latine et Caraïbes (CEPALC)  Alicia Bárcena Ibarra; Mohammed Al Maita, conseiller de la Commission Nationale pour les Travailleurs Migrants et les Réfugiés en Jordanie; Henrique Barros, chef du Conseil National de la Santé du Portugal et directeur du Département de la Santé Publique a l’Université de Porto, et Kate Philip, responsable du pilier de croissance inclusive de l'Initiative présidentielle pour l'emploi des jeunes en Afrique du Sud.

De hauts responsables des Nations Unies mettent en lumière les inégalités et les déficits du développement.

Expliquant comment le COVID-19 affecte les travailleurs informels au plan mondial, M. Ryder de l’OIT a noté que la situation est le résultat direct des retards dans la mise en œuvre des ODD. Il a aussi expliqué que l’une des leçons de la pandémie du coronavirus, est la nécessité de redoubler d’efforts pour atteindre les objectifs de l’Agenda 2030. Ceci inclut la formalisation de l’économie informelle, soulignant les recommandations de l’OIT à cet effet, qui appellent à des mesures de protection sociale, a ajouté Mr Ryder. Cependant, le responsable de l’OIT a mentionné qu’au vu des progrès des ODD déjà en retard avant la pandémie, les défis qui s’y lient sont désormais encore plus élevés.

Réfléchissant à la situation en Amérique latine et dans les Caraïbes, Mme Bárcena Ibarra s'est concentrée sur les individus les plus durement touchés par le COVID-19 tels que les femmes, les migrants, les peuples autochtones et les jeunes. Elle a souligné que la pandémie a dramatiquement exacerbé les inégalités préexistantes dans sa région qui est maintenant l'épicentre mondial de l'épidémie. Alors que certains gouvernements de la région ont pris des mesures pour faire face aux impacts sanitaires et socio-économiques immédiats du COVID-19, la secrétaire exécutive de la CEPALC a réitéré qu'un nouveau pacte social est nécessaire pour fournir une protection sociale universelle et l'accès à des systèmes de santé robustes. Elle a souligné que reconstruire en mieux signifie le faire avec égalité, durabilité environnementale et veiller à ce que personne ne soit laissé pour compte.

Faisant écho à la responsable de la CEPALC, Mme Valovaya a estimé que la communauté internationale ne peut plus retourner aux mêmes priorités et systèmes que par le passé. Elle ajoute que le rétablissement après la COVID-19 doit être abordé comme étant une opportunité d’établir une résilience à long terme pour toutes les communautés, et de protéger les pauvres et les plus vulnérables dans nos sociétés. La directrice générale de l’ONU Genève mentionne que la période d’après- coronavirus sera la plus pénible, l’Agenda 2030 et l’Accord de Paris sur le changement climatique sont d’intérêt aujourd’hui plus que jamais, de même que le suivi de la feuille de route multilatérale.

En guidant la discussion, Mme Isler du SDG Lab a demandé aux panélistes leur avis sur comment encourager les gouvernements à s’assurer que les mesures et approches déployées pour répondre à la pandémie restent en place sur le plus long terme. Elle a évoqué les exemples des pays qui ont adopté des schémas de protection sociale qui étaient loin d’être des priorités auparavant, ou même complètement absents des agendas nationaux avant l’arrivée du virus. Le directrice du Lab a invité les conférenciers de haut niveau et les autres participants à réfléchir à la meilleure façon de préserver des mesures correspondant à la «nouvelle norme» dans la reprise.

Les solutions des pays pour construire la résilience

La seconde partie de la discussion s’est centrée sur la manière dont la Jordanie, le Portugal et l’Afrique du Sud ont œuvré pour garantir le bien-être socio- économique des travailleurs informels et des autres groupes vulnérables.

Les représentants des pays ont cité les mesures déjà mises en place par leur gouvernement ou celles qui ont été rapidement déployées en réponse au COVID-19 : la mobilisation des dialogues sociaux, le renforcement et l’extension des programmes de sécurité sociale, rendre opérationnel les initiatives publiques d’emploi… Leurs expériences mettent en évidence le rôle essentiel et positif des différents types de protection sociale dans la réduction des inégalités, l’amoindrissement de l’impact des chocs économiques, combattant la pauvreté et contribuant à un plus large développement durable.

Jordanie

M. Al Maita a expliqué comment l’approche de la Jordanie en matière de soutien aux réfugiés et aux Jordaniens vulnérables lui avait permis de réagir efficacement aux effets de la pandémie de COVID-19. Son programme d'investissement à forte intensité d'emploi, développé avec l'OIT, se concentre sur l'amélioration des conditions de vie des groupes vulnérables grâce à l'accès aux services financiers et aux permis de travail, au soutien du revenu et aux initiatives de maintien dans l'emploi, ainsi qu'à des mesures à plus long terme pour soutenir une transition hors du secteur informel. M. Al Maita a souligné l'importance d'un dialogue multi-sectoriel entre les gouvernements, les organisations internationales et les groupes représentant les travailleurs et les employeurs comme un instrument clé pour renforcer la préparation aux crises.

Portugal

Le professeur Barros a mis en avant les larges mesures que le Portugal a institué pour supporter les travailleurs informels, les travailleurs migrants, les demandeurs d’asile et autres populations vulnérable. Plus particulièrement, il a souligné une politique qui accorde aux migrants et aux demandeurs d’asile, ou ceux qui ont une demande de résidence en attente une résidence temporaire pour accéder aux programmes de soutien social et aux services de santé. Il a aussi évoqué la sensibilisation faite concernant le COVID-19 et les activités protégeant les communautés des travailleurs migrants. Pour le professeur Barros, les efforts du gouvernement portugais caractérisent ce à quoi «ne laisser personne de côté» ressemble dans la pratique et devraient aider à informer d'autres pays dans la conception de mesures similaires.

Afrique du Sud

Kate Philip a énoncé que l’approche sud-africaine pour faire face aux inégalités durant la COVID-19 s’est définie sur la base des réponses des pays depuis des décennies pour le VIH. Elle a noté comment les programmes publics d’emploi (PEP), qui ont été mis en place pour lutter contre les inégalités liées à l’aide aux personnes vivant avec le VIH et affectées par le VIH, se sont révélés être le fondement de la riposte nationale au coronavirus. L’utilisation du PEP dans le domaine de la santé, a converti les travailleurs de la santé non payés ou informels de même que ceux travaillant à domicile dans le système formel, une politique innovante qui a été un instrument dans le support aux pauvres et communautés vulnérables lors de la pandémie. La docteur Philip souligne que l’expérience sud-africaine démontre comment le PEP, accompagne d’autres instruments de protection sociale, renforce fondamentalement la préparation en cas d’urgence.

Citations

“L'écosystème genevois nous offre une plateforme unique pour trouver les solutions pour lutter contre les inégalités mondiales exposées par la pandémie. Nous ne devons pas seulement réfléchir à la manière de nous remettre, mais aussi à mieux nous remettre et à lutter contre les inégalités sous toutes leurs formes.”

- Ms. Tatiana Valovaya, directrice générale, UN Geneva.

“La complémentarité entre la protection sociale et le programme public a l’emploi est la clé pour réduire les inégalités et donner une plus grande équité. La leçon de cette pandémie pour l’avenir est que nous devons consacrer à nouveau à l’Agenda 2030 parce que les circonstances actuelles sont un résultat direct de déficits. Nous devons reconnaitre que la pente est maintenant glissante et la montagne est élevée, nous devons redoubler d’efforts”.

- M. Guy Ryder, directeur general, OIT.

”Nous avons besoin d’un nouveau contrat social, une nouvelle aide sociale étatique qui reconnait le principe de la protection sociale universelle, avec l’accès à des systèmes de santé de qualité, et construire en retour avec égalité et durabilité”. 

- Mme Alicia Bárcena Ibarra, secrétaire exécutive, ECLAC

”Les fortes inégalités que nous observons dans cette crise ne sont rien de moins que l'illustration brute que les ODD n'ont pas été atteints et que les 17 objectifs sont plus pertinents que jamais”. 

- Nadia Isler, Directrice du SDG Lab

”Les agences gouvernementales, les organisations internationales, ainsi que les représentants des travailleurs et des employeurs, devraient développer une approche intégrée pour promouvoir de meilleurs emplois et la sécurité de l'emploi pour les travailleurs migrants et réfugiés. Le dialogue social serait le meilleur instrument nous permettant de faire face ensemble à la pandémie.”. 

- M. Mohammad Al Maita, conseiller à la Commission Nationale pour les Travailleurs Migrants et les Refugiés en Jordanie.

”Nous devons garantir l'accès universel aux services de santé pour un rétablissement complet et les besoins particuliers des populations vulnérables pendant la pandémie doivent être pris en compte”. 

- Dr. Henrique Barros, responsable de Conseil National de la Santé et directeur du Département de la Santé à l’Université de Porto.

“Les programmes publics d'emploi sont un excellent instrument social complémentaire aux programmes de protection sociale. Ils réduisent la pauvreté et les inégalités, s'attaquent à la vulnérabilité du secteur informel et contribuent à la mise en œuvre des ODD”.

Dr. Kate Philip, responsable du pilier de croissance inclusive de l'Initiative présidentielle pour l'emploi des jeunes en Afrique du Sud.


Objectifs
8
.
Travail Décent et Croissance Économique
9
.
Industrie, Innovation et Infrastructures
11
.
Villes et Communautés Durables
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